Usine Bellerive

Une chaussée, deux usines

L’usine de Bellerive s’est développée sur la Lergue à la hauteur de la chaussée partagée avec l’usine du Bouldou qui lui fait face. Au début du 19e siècle, l’usine appartient à des fabricants de draps de Clermont-l’Hérault. Une passerelle enjambant la Lergue est construite dans les années 1920 afin de relier l’usine de Bellerive à celle du Bouldou.1 En 1924 elle est annexée par l’entreprise Teisserenc Harlachol qui détient alors la totalité du site, de part et d’autre de la rivière.

Les bâtiments sont organisés autour d’une cour centrale dont l’entrée est marquée par un portail monumental doté de piliers en grès et avec deux très beaux vantaux en ferronnerie (dernier quart du 19e siècle), un des derniers conservés à Lodève. L’ensemble bâti à l’ouest de la cour se compose de 4 corps de bâtiments. Le bâtiment à 3 étages carrés (atelier textile) présente une façade percée de fenêtres ordonnancées par 8 travées (encadrements droits en grès). Le plancher du 2e étage a été renforcé par des tirants métalliques visibles en façade. Dans le prolongement d’un bâtiment d’un étage se trouvent des espaces sous sheds recouverts de tuiles mécaniques, qui abritaient les ateliers de réparation et les magasins de la société Teisserenc-Harlachol. L’entrée sur cour est surmontée d’un fronton percé en son centre d’un occulus.

L’ensemble à l’Est de la cour, qui abritait les apprêts, présente un long front bâti d’un étage carré. L’enduit de façade et les réouvertures pratiquées sur la façade sur cour masquent les époques successives de construction. Néanmoins, la façade sur rue de l’atelier d’apprêt, ordonnancée sur 10 travées, rappelle l’architecture des ateliers textiles construits dans le dernier quart du 19e siècle. A sa suite, les bâtiments, plus récents, ont été dénaturés par leur réutilisation en magasin de meubles.
Le pavillon (logement patronal?), sur un plan carré, composé d’un étage carré avec étage de combles, est surmonté d’un toit en pavillon couvert de tuiles canal. Deux entrées sur la façade sud sont ornées d’éléments de décors de style classique (colonnes saillantes, arcs en plein cintre et entablement saillant). L’entrée donnant sur cour est soulignée d’un arc surbaissé, surmontée d’un balcon.

Au 18e siècle les bâtiments bordant la rivière ont abrité une production de draps confectionnés à partir de laines cardées. Au début du 19e siècle, ils font partie de la maison Rouquet, Marréaud et Devaux, fabricants de draps à Clermont l’Hérault.
De nouveaux ateliers (magasins, foulerie, atelier de tissage et machine à vapeur à partir de 1868) sont construits au milieu du 19e siècle. Dans les années 1880 sont installés : une essoreuse, une rameuse, une cage pour la locomobile, de nouveaux foulons (très certainement à cylindres) et des magasins. En 1893 est créée la Société des fabriques de Clermont et Lodève, par l’association de la maison Rouquet, Marréaud et Devaux avec Polydore, Ernest et Frédéric Teisserenc qui possèdent une usine au faubourg des Carmes (située face à l’usine de l’étendage, aujourd’hui détruite) et à l’usine du Martinet à Soubès. L’usine de Bellerive administrée par Ernest Teisserenc, puis par M. Got, connaît plusieurs extensions entre les années 1890 et 1920.

Un troisième générateur ( ?), une bascule, un lavoir, et des écuries complètent les installations. Elles comptent également un étendage et une teinturerie. En 1915, le site est équipé d’un moteur à gaz. En 1922, la compagnie drapière Gallia remplace la Société des Fabriques de Clermont et Lodéve. Elle est rachetée par les établissements Teisserenc-Harlachol l’année suivante, qui fusionnent avec les établissements Vitalis en 1927. A cette date, le site n’abrite plus aucune activité productive. Reliés à l’usine du Bouldou par une passerelle enjambant le cours d’eau, les locaux sont utilisés comme magasin et garages, et ceux nouvellement construits (ateliers sous sheds) abritent un atelier de réparation. A cette époque, les 400 employés de la maison Teisserenc-Harlachol poursuivent la fabrication des draps destinés à l’armée, à la marine ainsi qu’aux grandes administrations françaises et étrangères. Ils produisent également des draps-cuir de livrées, des flanelles, des velours de laine, des molletons et couvertures et des feutres tissés.
Face à la crise de l’industrie de la laine cardée, les établissements Giroud de Vienne (Isère), devenus majoritaires au capital en 1957, tentent d’implanter la fabrication de tissus à pantoufles et de couvertures de literie et de voyage
(AD34, 651W9). La fermeture de l’usine Teisserenc-Harlachol, en juillet 1960, marque la fin de la production de draps à Lodève. Un atelier de construction de bateaux de la société American Boats Company, puis un magasin de meubles sont établis dans une partie des locaux de Bellerive, le reste étant occupé par des logements.

Auteur : Lisa Caliste – ajouts de Flore Viglieno et Jean-Pierre Henri Azéma
Crédits photo : Xavier Spertini
Sources :
Le Bouldou : morceaux d’histoire – Bernard Derrieu 2021
Inventaire du patrimoine de la Région Lisa Caliste